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Bonne

Nouv.elle

!

— La parole inclusive du dimanche,
Du premier dimanche de l’Avent au dimanche de Pâques, un.e invité.e nous donne à entendre l’homélie dominicale.

S4 Episode 20

26/03/2023 – 5e dimanche de Carême

Lecture de l’évangile : Camille

Homélie : Ostiane

Et sur Anchor.fm, Spotify ou d’autres plateformes de podcasts.

Textes du jour

Ex 37, 12-14
Ps 129
Rm 8, 8-11
Jn 11, 1-45
(Lire les textes sur aelf.org)

Le texte de l’homélie

Jésus a-t-il ri ? Le contraire serait étonnant, si le Christ a été vrai homme. Devant le paralytique guéri à Bethesda qui repart en courant partout, fou de joie, avec son brancard sous le bras, on imagine difficilement le Christ rester stoïque. Mais nous n’avons pas gardé de trace du rire du Christ. Nous avons en revanche plusieurs témoignages de ses larmes,
et le texte de ce jour, la résurrection de Lazare, en est un : « alors Jésus se mit à pleurer ». « Pleurer avec ceux qui pleurent », comme nous y invite saint Paul (Rm 12, 15), c’est déjà imiter le Christ qui partage les larmes de Marie à Béthanie. Saint Augustin remarquait cette douceur étonnante des larmes, où l’on goûte déjà, au cœur de la peine et de l’amertume, quelque chose comme un commencement de réconfort. Peut-être est-ce là un très discret et très humble avant-goût de ce Royaume où les affligés seront consolés, dont le Christ est venu porter la Bonne Nouvelle inouïe au monde.
Trois points peuvent nourrir notre méditation de ce texte. Le premier, c’est l’inconcevable intimité du Christ avec celles et ceux qui l’aiment et qui croient en lui. « Jésus aimait Marthe et sa sœur, ainsi que Lazare ». Que nous révèlent ces amitiés du Christ ? Le Christ n’est pas abstraitement un bienfaiteur du genre humain. C’est avec chacune et chacun d’entre nous qu’il veut se lier personnellement, intimement, et autant que nous accepterons son invitation à nous laisser aimer par lui. Le Christ peut tout accueillir de nous, dans son amour inépuisable ; il n’est rien que nous ne puissions lui confier. « Dans la nuit, je me souviens de toi, et je reste des heures à te parler », dit le psalmiste (Ps 62, 7) : ce verset m’évoque les conversations chuchotées sans fin avec mes amies, quand nous étions petites filles et que nous nous invitions à dormir. Il y a un très beau texte de Thérèse d’Avila sur cette expérience de l’amitié du Christ, tiré de son autobiographie : « En présence de Jésus Christ, si bon ami et si bon capitaine qui s’exposa le premier à la douleur, on peut tout souffrir. Il nous vient en aide et nous donne des forces ; jamais il ne nous fait défaut ; c’est un véritable ami (…) Que voulons-nous avoir de mieux à nos côtés qu’un si bon ami qui ne nous abandonnera pas dans les peines et les tribulations, comme le font ceux du monde ? Bienheureux celui qui l’aime et le garde toujours auprès de lui. Regardons le glorieux saint Paul, on eût dit que Jésus lui sortait toujours par la bouche, tant il le gardait présent dans son cœur. »
Un second point de méditation, c’est la foi que confesse Marthe. Elle la confesse en deux temps : « je sais qu’il [Lazare] ressuscitera à la résurrection, au dernier jour » et « oui, Seigneur, je le crois : tu es le Christ, le Fils de Dieu, tu es celui qui vient dans le monde ». Le premier acte de foi, en la résurrection des morts au dernier jour, est fidèle à la foi juive reçue par Marthe. Mais Jésus vient bouleverser, illuminer et accomplir cette croyance en la résurrection en se révélant lui-même. « Moi, je suis la résurrection et la vie. Celui qui croit en moi, même s’il meurt, vivra ; quiconque vit et croit en moi ne mourra jamais ». Jésus se révèle lui-même comme « le chemin, la vérité et la vie » : c’est bien de la vie éternelle qu’il est question. Pour les chrétiens, la vie éternelle est une personne : c’est le Christ. Marthe ouvre les yeux pour contempler, pour la première fois en toute clarté, ce grand mystère. La douleur déchirante qu’elle ressent et qui devrait l’empêcher de parler au-delà d’un balbutiement et d’un sanglot, ne l’empêche pas d’articuler avec force sa foi en Jésus Christ, Fils de Dieu, qui est la résurrection et la vie.
Un dernier point de méditation, c’est le signe lui-même de la résurrection de Lazare. Commençons par remarquer l’attitude déroutante de Jésus face à la maladie de Lazare : après avoir appris la nouvelle, au lieu d’accourir, il laisse passer encore deux jours pleins. C’est que, comme le dit le Christ, cette maladie de Lazare n’est pas « pour la mort mais « pour la gloire de Dieu, afin que par elle le Fils de Dieu soit glorifié » : cette gloire resplendira de façon encore plus éclatante si Lazare traverse l’épreuve de la mort. Que signifie cette « glorification du Christ » en vue de laquelle Lazare passe par la maladie et la mort ? Le Christ est-il glorifié parce qu’il manifeste sa puissance en tirant Lazare de la mort ? Est-ce là le sens de cette « glorification », celle d’avoir accompli un très grand miracle ? Mais la gloire du Christ, c’est la croix. Si le Christ est glorifié par la maladie de Lazare, c’est que c’est par elle que sa Passion va advenir. La Judée est un lieu dangereux pour le Christ qui manque d’y être lapidé au chapitre précédent, et c’est bien la guérison de Lazare qui conduira au complot des pharisiens et des grands prêtres conduisant à sa crucifixion. Dirigeons-nous, nous aussi, vers la contemplation de la Passion, à la lumière de la résurrection qui luit déjà à Béthanie où Lazare, Marthe et Marie peuvent chanter avec le Psalmiste (Ps 29, 12-13) : « Tu as changé mon deuil en une danse, mes habits funèbres en parure de joie. »

Ostiane

Ostiane enseigne la philosophie et s’efforce de finir sa thèse. Elle aimerait poursuivre des études de théologie et a déjà commencé à prendre quelques cours à l’Angelicum. Elle organise avec une amie, Marie, un cycle au café-associatif le Dorothy sur « l’Eglise et les voix des femmes ».